Fil
Curieux de voir comment, en tirant sur un fil d’une affaire complexe, c’est tout un ensemble de questions qui apparaissent, mais pas n’importe lesquelles. Il y a une forme de sélection qui s’opère.
Prenons les retraites, objet actuel d’un débat animé. En tirant sur le fil, sortent au grand jour une série de sujets que les protagonistes essayaient d’instrumentaliser ou, au contraire, d’esquiver, plus ou moins consciemment, selon les postures de départ. Le vieillissement, bien sûr, mais aussi les inégalités de traitement (point de départ du débat en l’occurrence), les modes de calcul, l’âge de prise de retraite, la faiblesse de certaines rémunérations (les enseignants notamment), la pénibilité, et bien d’autres choses encore. Curieusement négligés le sens du travail, son utilité sociale, la qualité de vie au travail (au-delà de la pénibilité), et toutes les richesses non monétaires que le travail peut apporter si on le respecte.
Fallait-il entrer dans ce débat en tirant sur le fil « retraite » ? Certains fils sont chargés d’émotions, de ressenti, de polémiques traditionnelles, de rancœurs, d’enjeux de pouvoirs et de vielles rivalités. N’est-il pas préférable de tirer un fil plus consensuel et au passé moins chargé ? Le vieillissement de la population est un phénomène plus objectif, mesurable et même largement prévisible. C’est la vraie question qui en entraîne bien d’autres, parmi lesquelles est la retraite, mais aussi comment la société traite ses vieux, que veulent les faire vieux des années gagnées sur la mort. Questions plus sociologiques ou politiques que financières, qui auraient permis d’élargir le cercle des participants, et d’aborder de manière plus sereine le sujet précis de la retraite réduite aujourd’hui, et c’est bien dommage, au seul aspect comptable. Changer d’approche permet d’entendre des points de vue nouveaux, de relativiser les anciens conflits, et d’enrichir les solutions envisagées. Bien sûr les protagonistes traditionnels traineront les pieds, car ils craignent de perdent ainsi une posture privilégiée, mais le pari peut être pris qu’ils seraient contents des avancées et du renouvellement du débat.
L’alimentation. Voilà une bonne manière d’aborder la question de l’agriculture. Un bon fil pour tirer la question complexe des relations entre tous les protagonistes, producteurs, industriels, distributeurs. On allait parler de la qualité des produits, des attentes des consommateurs, des impacts sur l’environnement, autant de sujets que les protagonistes habituels ne voulaient pas aborder. Et bien vous l’avez constaté, l’innovation est détournée pour se réduire dans les faits à une table ronde traditionnelle, dont les résultats sont décevants, comme d’habitude. Même quand le bon fil est identifié, il est difficile de l’imposer, le changement provoque toujours des résistances.
Le bâtiment. Un enjeu fort d’économie (quand le bâtiment va, tout va…), de vie sociale (nous passons l’essentiel de nos vies dans des bâtiments), et d’environnement (consommation d’espace, de ressources et d’énergie, production de déchets et de rejets dans l’atmosphère). Chacun s’y intéresse, avec en premier lieu la question du logement. Un secteur d’activité à moderniser pour de nombreuses raisons, conditions de travail des personnels, adaptation des métiers à la rénovation plutôt qu’à la construction neuve, réduction de la pression sur les ressources naturelles, et amélioration des conditions de vie, santé et confort des occupants. Le fil retenu pour faire bouger les choses est l’énergie et le climat. Un vrai sujet, mais faut-il partir de ces questions très techniques pour construire une politique et motiver les acteurs ? Faut-il rappeler que l’on ne construit pas pour faires des économies d’énergie mais pour offrir à des êtres humains des cadres de vie et d’habitat conformes à leurs besoins et à leurs désirs ? Ne nous étonnons pas des difficultés de mobiliser l’opinion, les acheteurs et les locataires sur le nécessaire effort de modernisation de notre parc immobilier. Le recours aux subventions et à la réglementation reste ainsi le moteur de la transformation, et non l’amélioration pour tous, clients et professionnels, sans oublier la planète qui en aurait profité en passager clandestin.
On le voit avec ces trois exemples, le fil que l’on tire pour démêler une affaire complexe n’est pas indifférent. Certains sont fructueux et permettent d’avancer et d’entraîner l’essentiel des acteurs concernés, d’autres rendent vain tout espoir de progrès, ou font appel dans les faits à des mesures coercitives.
Le développement durable est la recherche d’un monde nouveau qui assure un avenir à l’humanité et préserve la planète. Il impose de revenir à la source des problèmes, souvent mal posés et envisagés selon des critères obsolètes. Trouver le bon fil à tirer pour démêler une affaire complexe, et tenir bon face aux résistances, voilà une voie du développement durable.
Prenons les retraites, objet actuel d’un débat animé. En tirant sur le fil, sortent au grand jour une série de sujets que les protagonistes essayaient d’instrumentaliser ou, au contraire, d’esquiver, plus ou moins consciemment, selon les postures de départ. Le vieillissement, bien sûr, mais aussi les inégalités de traitement (point de départ du débat en l’occurrence), les modes de calcul, l’âge de prise de retraite, la faiblesse de certaines rémunérations (les enseignants notamment), la pénibilité, et bien d’autres choses encore. Curieusement négligés le sens du travail, son utilité sociale, la qualité de vie au travail (au-delà de la pénibilité), et toutes les richesses non monétaires que le travail peut apporter si on le respecte.
Fallait-il entrer dans ce débat en tirant sur le fil « retraite » ? Certains fils sont chargés d’émotions, de ressenti, de polémiques traditionnelles, de rancœurs, d’enjeux de pouvoirs et de vielles rivalités. N’est-il pas préférable de tirer un fil plus consensuel et au passé moins chargé ? Le vieillissement de la population est un phénomène plus objectif, mesurable et même largement prévisible. C’est la vraie question qui en entraîne bien d’autres, parmi lesquelles est la retraite, mais aussi comment la société traite ses vieux, que veulent les faire vieux des années gagnées sur la mort. Questions plus sociologiques ou politiques que financières, qui auraient permis d’élargir le cercle des participants, et d’aborder de manière plus sereine le sujet précis de la retraite réduite aujourd’hui, et c’est bien dommage, au seul aspect comptable. Changer d’approche permet d’entendre des points de vue nouveaux, de relativiser les anciens conflits, et d’enrichir les solutions envisagées. Bien sûr les protagonistes traditionnels traineront les pieds, car ils craignent de perdent ainsi une posture privilégiée, mais le pari peut être pris qu’ils seraient contents des avancées et du renouvellement du débat.
L’alimentation. Voilà une bonne manière d’aborder la question de l’agriculture. Un bon fil pour tirer la question complexe des relations entre tous les protagonistes, producteurs, industriels, distributeurs. On allait parler de la qualité des produits, des attentes des consommateurs, des impacts sur l’environnement, autant de sujets que les protagonistes habituels ne voulaient pas aborder. Et bien vous l’avez constaté, l’innovation est détournée pour se réduire dans les faits à une table ronde traditionnelle, dont les résultats sont décevants, comme d’habitude. Même quand le bon fil est identifié, il est difficile de l’imposer, le changement provoque toujours des résistances.
Le bâtiment. Un enjeu fort d’économie (quand le bâtiment va, tout va…), de vie sociale (nous passons l’essentiel de nos vies dans des bâtiments), et d’environnement (consommation d’espace, de ressources et d’énergie, production de déchets et de rejets dans l’atmosphère). Chacun s’y intéresse, avec en premier lieu la question du logement. Un secteur d’activité à moderniser pour de nombreuses raisons, conditions de travail des personnels, adaptation des métiers à la rénovation plutôt qu’à la construction neuve, réduction de la pression sur les ressources naturelles, et amélioration des conditions de vie, santé et confort des occupants. Le fil retenu pour faire bouger les choses est l’énergie et le climat. Un vrai sujet, mais faut-il partir de ces questions très techniques pour construire une politique et motiver les acteurs ? Faut-il rappeler que l’on ne construit pas pour faires des économies d’énergie mais pour offrir à des êtres humains des cadres de vie et d’habitat conformes à leurs besoins et à leurs désirs ? Ne nous étonnons pas des difficultés de mobiliser l’opinion, les acheteurs et les locataires sur le nécessaire effort de modernisation de notre parc immobilier. Le recours aux subventions et à la réglementation reste ainsi le moteur de la transformation, et non l’amélioration pour tous, clients et professionnels, sans oublier la planète qui en aurait profité en passager clandestin.
On le voit avec ces trois exemples, le fil que l’on tire pour démêler une affaire complexe n’est pas indifférent. Certains sont fructueux et permettent d’avancer et d’entraîner l’essentiel des acteurs concernés, d’autres rendent vain tout espoir de progrès, ou font appel dans les faits à des mesures coercitives.
Le développement durable est la recherche d’un monde nouveau qui assure un avenir à l’humanité et préserve la planète. Il impose de revenir à la source des problèmes, souvent mal posés et envisagés selon des critères obsolètes. Trouver le bon fil à tirer pour démêler une affaire complexe, et tenir bon face aux résistances, voilà une voie du développement durable.
Photo : Amirali Mirhashemian-unsplash
- Vues : 1116
Ajouter un Commentaire