Drone
Un mot qui sent la poudre, ou plutôt le gaz lacrymogène. On en parle beaucoup depuis qu’il survole des manifestations, ou qu’il est devenu une arme de guerre. Et pourtant, il peut aussi rendre bien des services. Nous revoilà avec la langue d’Esope, la meilleure ou la pire des choses.
Au départ, il s’agit d’avions sans pilote, et son origine est bien militaire, dès la fin de la première guerre mondiale, avec une commande par TSF, télégraphie sans fil pour les jeunes qui n’ont pas connu ce temps-là. Radio Days, pour reprendre le titre d’un film de Woody Allen. Essentiellement pour des missions de reconnaissance ou d’observation. Il a fait son chemin depuis.
C’est un véritable ordinateur volant, il manie l’intelligence artificielle pour trouver le meilleur chemin et éviter les obstacles, il peut parcourir des milliers de kilomètres, et rester en l’air plusieurs années grâce à des capteurs solaires. Il a changé de nom, pour s’assimiler au genre animal, plus précisément aux insectes volants. Drone signifie faux bourdon chez les américains. Sa forme moderne est entrée dans l’arsenal des USA en 1990 et en France en 2011. Le drone porte des appareils de photo ou des caméras, pour l’observation, mais il lui arrive aussi d’être muni d’armes, de bombes. Il coute beaucoup moins cher que des avions, et il n’y a pas de pilote à rapatrier en cas de problème. Il est utilisé par les armées les plus sophistiquées, mais on l’appelle aussi le missile du pauvre, parfois kamikaze, comme on l’a vu au moyen orient des dernières années. Ajoutons qu’il peut voler bas, et qu’il échappe ainsi aux radars, une qualité recherchée !
Le drone cherche aussi sa place dans le civil. Son œil vif et mobile lui permet de jouer sur plusieurs tableaux. La géographie, tout d’abord, thème proche de la guerre si l’on en croit Yves Lacoste. Plus maniable que les avions, moins cher, il permet des couvertures aériennes bien utiles pour établir des cartes ou les mettre à jour, pour des SIG, systèmes d’infirmation géographique. C’est aussi un instrument de surveillance. Il n’y a pas que la police et les manifestations, il y a des quantités d’ouvrages qui doivent être visités régulièrement, voire auscultés, ce que le drone fait pour pas cher. Il s’agit de lignes électriques, de voies de chemin de fer, de barrage ou autres grands édifices qui sont ainsi examiné de près par des experts parfois très éloignés. Le patrimoine en bénéficie autant que les ouvrages techniques. S’il met des filtres infra rouges sur ses appareils de photo, le drone est un outil performant pour des analyses thermographiques de bâtiments. Bon pour lutter contre l’effet de serre.
Le drone fait du cinéma, il produit de magnifiques images, fixes ou animées. Pour le plaisir des yeux et les émotions, dans le champ artistique, mais aussi pour le journalisme. Il va partout, même là où il est délicat ou difficile de se rendre, ou même dangereux. Zones de guerre, lendemains de cataclysmes, zones naturelles sensibles par exemple. Il devient ainsi un instrument d’information. Dans le même domaine, il devient parfois un relai Internet en prenant de la hauteur et de l’ampleur. Google mise sur ce genre d’engin, qui déploient de grandes ailes à haute altitude et s’alimente grâce à des cellules photovoltaïques.
C’est aussi un engin de sécurité. On l’emploie pour secourir les noyés : il leur envoie des bouées, certaines villes lui confient la tâche d’amener des défibrillateurs en urgence là où ils s’avèrent nécessaires. Le drone devient un auxiliaire agricole. Il permet d’observer les sols, les cultures, les troupeaux, il traite les images avec une dose d’intelligence artificielle et les confie à l’agriculteur qui en fera bon usage. Il aide aussi le naturaliste pour le comptage de nids, par exemple, opération à faire avec prudence pour ne pas effaroucher les oiseaux. Et puis il est le dernier avatar de l’aéromodélisme, et se multiplie comme un instrument de loisir.
Terminons cette liste d’usages des drones avec la livraison de paquets. On en parle beaucoup. Le drone va vite, se joue des embouteillages, mais il ne peut embarquer des charges trop lourdes, et sa consommation d’énergie, en ville, est bien supérieure à celle d’un cycliste ou d’une camionnette électrique qui livre des dizaines d’objets en une seule tournée.
Malgré toutes ses qualités, le drone connait des limites. Celle de l’espace aérien, surtout en ville où il pourrait être vite saturé. Il doit en plus le partager avec les oiseaux. Peu de collisions, semble-t-il aujourd’hui, les oiseaux dérangés prenant la fuite la plupart du temps. Mais attention à ne pas s’approcher des nids ou des grands rassemblements. En juin 2019, les goélands ont attaqué les drones de la police ! Le drone reste fragile, notamment sur son volet électronique. Malware et piratages le guettent. Et il y a le bruit. Acceptable aujourd’hui, il deviendra insupportable si les drones se multiplient. Une réglementation technique est nécessaire sur ce point, pour éviter une réaction de rejet.
Il reste la protection de la vie privée, ces drones pouvant se montrer très indiscrets. Ils vont partout, et violeraient facilement votre intimité. La règlementation encadre l’usage des drones, et leur interdit de survoler des villes, de vous prendre en photo sans votre consentement, de voler la nuit et dans les zones naturelles sensibles. Des règles du jeu à faire respecter.
Voilà donc un nouveau venu dans notre univers quotidien, un peu comme l’imprimante 3D pour rester dans les innovations technologiques. Encore modeste, il a de l’avenir s’il ne dérape pas, il peut nous rendre de grands service s’il sait rester dans son espace naturel et apporter toutes les garanties de non intrusion dans la vie des humains et celle des non humains.
Photo : Flyinf eye / Unsplash
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