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Les mauvais calculs

Les accusations portées à l’environnement sont de diverses natures, mais celle du prix à payer est sans doute la plus fréquente. Paradoxalement, c’est le repli que connait actuellement les politiques de l’environnement qui coutera cher. Le coût du laisser-faire en matière d’environnement est beaucoup plus lourd que celui des actions à mener. Symétriquement, les politiques favorables à l’environnement sont rentables économiquement parlant. Pour prendre un exemple dans l’actualité récente, le règlement européen sur la restauration de la nature, un euro dépensé générera un gain de 8 euros, selon le commissaire européen en charge du projet. En matière de climat, le rapport est de 1 à 5 au minimum, selon l’économiste britannique Nicolas Stern dans son étude de 2006.

Les retours d’investissement sont nombreux. Il y a les couts évités, dividende attendu des politiques de prévention. Leur montant s’évalue à partir, hélas, des coûts des sinistres liés à l’absence de prise en compte de l’environnement, comme les catastrophes naturelles, en forte augmentation pour cause climatique, ou technologiques, par défaut de précaution dans les développements industriels. Il y en a bien d’autres, plus diffus, et par suite plus difficiles à comptabiliser. Notre santé, notamment, est largement conditionnée par l’état de l’environnement, comme la qualité de l’air et de l’eau, le niveau de bruit, et même l’ambiance paysagère et son impact sur notre santé mentale. Combien de maladies qui pèsent lourd sur le budget de la sécurité sociale ont une pollution pour origine ? Ajoutons tous les traitements rendus nécessaires pour éliminer des produits nocifs, notamment pour rendre potable une eau chargée en nitrates et autres polluants éternels.

Et puis il y a les dividendes en termes de valeur créée, ou de cout global. Un logement construit selon les normes d’aujourd’hui coutera bien moins cher à ses occupants. Il y a tous les « services gratuits » rendus par la nature, pour peu que nous la respections. Leur valeur est estimée à l’échelle mondiale à au moins le PIB marchand. Le tourisme, première activité économique et France et dans le monde, est le premier bénéficiaire des politiques d’environnement.

Arrêtons-là la liste des bienfaits d’une politique ambitieuse d’environnement, et interrogeons-nous sur les raisons pour lesquelles la perspective de ces bénéfices ne produit pas ses effets. Les coûts sont facilement imputés à l’environnement, alors que les bénéfices sont enregistrés dans d’autres domaines, et considérés comme allant de soi. L’environnement apparait comme une source de dépenses, et non de profits. Ceux-ci sont souvent décalés dans le temps et dans l’espace, et il reviendrait à la puissance publique de rétablir une correspondance entre l’investissement et le retour d’investissement, notamment avec l’appui du système bancaire.

Des investissements qu’il convient aussi d’inscrire dans une politique industrielle, et les filières d’avenir.

La frilosité de l’Europe et de la France en matière d’environnement, dans le contexte de dénigrement que nous observons depuis quelques mois, risque de nous couter très cher, notamment dans le contexte international : La Chine, par exemple, a atteint dès 2024 ses objectifs 2030 en matière d’énergies renouvelables, avec 6 ans d’avance, alors que la France ne parvient pas à rattraper son retard par rapport à ses propres prévisions. La Chine prend une position dominante sur ce qui sera, et est déjà, la première source d’énergie dans le monde, au titre des nouvelles capacités de production.

L’environnement est une bonne affaire, à condition d’y aller franchement et de ne pas se tromper de futur.

Edito 7 aout 2024

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