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Bouffe

Restes

Les restes sont souvent le fruit d'excès ou d'imprudences. Mais ils ne sont pas de même nature, selon qu'ils sont ou non réutilisés sous une forme ou sous une autre.

Au lendemain des fêtes, l'art d'accommoder les restes est une Vertu cardinale. Il s'agit là de restes éphémères, le plus souvent, qu'il convient d'intégrer dans des menus courants avant qu'il ne soient périmés et bons pour le compost.



Il existe aussi d'autres formes de restes, ceux-ci hélas durables. Je veux parler des restes d'une activité industrielle mal contrôlée, très répandue aux heures Glorieuses de la révolution industrielle. On pense en premier lieu aux grandes usines, comme les usines à Gaz. Le chantier du Stade de France est encore dans les esprits, et a révélé la question au grand public. Il y a aussi les mines, et les dépôts de restes, les stériles prélevés et rejetés une fois le minerai récupéré. Les plus grandes ne sont pas forcément les plus dangereuses. Bien sûr, les terrils des houillères devront être suivis pendant des années, et font l'objet de traitements lourds, mais il ne faut pas se laisser impressionner. La nature des prélèvements et les procédés d'extraction des minerais jouent un rôle déterminant. On a souvent recours à des bains composés de produits chimiques, et on a souvent des Mélanges de produits qui compliquent singulièrement le tri des matériaux arrachés à la mine. On se retrouve ainsi avec de l'arsenic, du mercure et du cyanure, par exemple, et des métaux lourds très dilués, qui constituent des polluants redoutables s'ils échappent à la vigilance du mineur. Et que dire si le mineur n'y attache aucune importance, comme ce fut le cas pendant des années. La question des sols pollués n'est sérieusement posée que depuis une vingtaine d'années, pour plus de deux siècles de révolution industrielle. Des restes qui coûtent Cher à la collectivité et à l'environnement. Des territoires stérilisés, avec parfois nécessité d'une protection, représentent un Prix à payer, direct pour les industriels et les pouvoirs publics (donc le contribuable), et indirect, avec effet Retard, par la collectivité, qui doit s'éloigner de ces sites, traiter les eaux de pluie qui lessivent ces Surfaces, et supporte des no man's lands, avec tous les inconvénients qui s'y rattachent.
On assiste ainsi à un transfert de charges de l'entreprise vers la collectivité. La réhabilitation des 581 Hectares du site de la mine d'or de Salsigne (Aude), devenu « orphelin » après un siècle d'exploitation d'or, d'argent, de cuivre, de bismuth et de souffre, a été évaluée à un montant équivalent aux Profits dégagés par l'exploitation. Jared Diamond, dans son ouvrage Effondrement (1), présente un constat équivalent aux Etats Unis. Parmi les exemples qu'il cite, la mine d'or de Summitville (Colorado), dont l'arrêt brutal en 1992, après 8 années d'exploitation, a provoqué la fin de la maintenance environnementale du site. Des débordements de bassins ont entraîné une diffusion de cyanure dans la rivière Alamosa, la polluant durablement sur 10 kilomètres. Coût de l'opération : 180 millions de dollars, dont 147 ont du être supportés par le contribuable. Des restes qui coûtent cher. Au total, aux Etats Unis, ce serait plus de 12 milliards de dollars qui seraient nécessaires pur restaurer les sites ainsi pollués. Écologie et économie sont bien liés indissolublement.
Les restes des activités antérieures sont innombrables. Des inventaires sont réalisés, mais il n'est pas question de traiter tous les sols pollués, indistinctement. Il faut qu'il y ait une raison à cela, Risque potentiel trop lourd, ou projets sur des sols dont l'histoire montre qu'ils renferment probablement des substances polluantes, qui seront remises en circulation, si on peut dire. Il faudrait ajouter dans cette description les sédiments des rivières et des estuaires, qui ont « piégé » des produits toxiques, lesquels sont remis en suspension à l'occasion de travaux de drainage par exemple. Il vaut mieux ne pas toucher à ces restes indésirables, mais ce serait dommage de stériliser ainsi des sites importants, souvent bien situés, et de s'avouer vaincu par la pollution.
Des techniques de dépollution des sols ont donc progressivement vu le jour, pour les fortes concentration tout d'abord, avec des moyens lourds : excavation et traitement en usine. En fonction du polluant, des approches diversifiés se sont développées, à base de procédés physiques, physico-chimiques, et plus récemment de stabilisation et d'extraction par des plantes. L'ADEME a réalisé un inventaire de ces méthodes, sous la forme d'un guide méthodologique édité en 2003, et qui doit être prochainement réédité du fait du Progrès de ces techniques. L'Union européenne contribue activement à ces recherches.
Pour revenir à Salsigne, les minerais de cette mine et de quelques autres étaient traités à la Combe du Saut, à quelques Kilomètres. L'ADEME expérimente sur ce site un procédé à base de plantes et d'amendements chimiques pour stabiliser les métaux et les empêcher soit de percoler dans les eaux souterraines soit d'être entraîné par le Vent vers des zones habitées (projet Difpolmine, co-financé par le programme européen Life environnement).
Il est d'usage de dire que nous devons laisser à nos enfants une Terre plus propre que celle que nous avons reçue de nos parents. C'est un retournement dans l'histoire, ou depuis la révolution industrielle, le progrès s'est réalisé par expansion du Système, sans prendre garde à ses restes. Si on n'y prendre garde à notre Tour, les coûts de réhabilitation ne feront que croître, avec des déchets de plus en plus sophistiqués au point de vue chimique, comme les déchets radio-actifs, ou biologiques, si les OGM produisent des monstres biologiques, ce contre quoi nous ne pouvons pas être garantis aujourd'hui. Le développement durable nous invite à penser aux restes dès que la production d'un produit est envisagée, en s'arrangeant pour que ces restes deviennent ressource pour d'autres activités.

1 - Effondrement, Comment les société décident de leur disparition ou de leur survie, Jared Diamond, NRF essais, Gallimard, 2006

Chronique publiée le 8 janvier 2007, revue le 26 novembre 2011

 

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