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Gouvernance

Collectif

L’action collective est victime d’un sentiment de perte de confiance dans les institutions. Elle demeure néanmoins bien plus performante que les actions des particuliers. Comment sortir de cette contradiction « par le haut » ?

Au football, le joueur qui joue « perso » est toujours l’objet de critiques : il faut jouer en équipe. Ce n’est pas le réflexe le mieux partagé, et souvent l’idée que tout seul, on décide mieux, on contrôle mieux, est dominant. Le jeu collectif est compliqué, il faut mettre tout le monde d’accord, il y en a qui profitent de la situation, etc. Faisons les choses tout seul, ça ira mieux. Et pourtant, l’action collective est souvent plus judicieuse. En voici quelques illustrations.

En matière d’environnement, la loi impose que les dommages que l’on provoque à l’occasion d’aménagements divers soient compensés. Des dommages qui n’ont pas pu être évité, car la première obligation est bien sûr de ne pas en faire, ou de les réduire au strict nécessaire. Les dommages résiduels, ceux qui restent malgré tout, doivent être compensés. Il faut recréer une richesse écologique en compensation de celle qui est détruite. C’est ainsi que des opérateurs achètent des terrains indépendamment de leurs travaux pour y effectuer des aménagements spécifiques de biodiversité. La loi « biodiversité » permet aussi de pratiquer par l’intermédiaire d’organismes collectifs. Au lieu de compenser perso, dans son coin, tel aménageur participe à une initiative collective, partagée. Au moment où l’approche « trame verte et bleue » s’impose pour les actions de protection de la biodiversité, une vision large, intégrant un territoire à la bonne échelle, est un avantage incontestable. Au lieu d’une solution isolée, le recours à un organisme collectif permet d’inscrire son action dans un plan cohérent, et d’en renforcer ainsi l’efficacité. La Caisse des dépôts a créé en octobre dernier le premier organisme de ce genre, Nature 2050. Un mois plus tard, c’est le département des Yvelines qui le fait à son échelle. Les aménageurs trouveront auprès de ces organismes collectifs à la fois des aides à la conception et au dimensionnement de leur compensation, et des sites d’intervention effective. Cela va « rendre l’écologie facile », ou du moins plus facile, une bonne chose.

Ces approches collectives ont plusieurs avantages. Elles permettent aux participants, qui sont le plus souvent profanes en matière d’environnement, de bénéficier d’une compétence technique bien utile pour poser la bonne question et trouver la bonne réponse. L’exemple des centrales villageoises illustre bien ces avantages. Il s’agit de créer un ensemble de capteurs solaires photovoltaïques dans un territoire. Plutôt que de laisser chaque propriétaire d’un toit bien orienté installer son capteur perso, l’idée est de créer un réseau des toits les mieux placés, avec une véritable gestion technique, juridique, et financière. Une garantie d’efficacité et de pérennité des performances qu’un particulier aurait du mal à obtenir en solo.

Les exemples abondent de solutions collectives plus intéressantes que les projets individuels. Le remembrement rural, souvent décrié, permet d’aller bien au-delà d’un simple échange de parcelles. Le projet devient collectif, et intéresse toute la commune, au lieu d’être un simple arrangement entre deux parties. Il permet ainsi d’avoir une vue commune, et de réaliser des travaux d’intérêt collectif. Faut-il encore que la vision de l’avenir du territoire concerné soit partagée, et cohérente avec les autres visions de partenaires, collectivités publiques, professionnelles, associatives. Une affaire de bonne gouvernance.

La condition à remplir pour que ces opérations collectives soient des succès est l’adhésion de tous les intéressés au projet. Un projet qui doit être élaboré en commun, et qui doit trouver une forme de gestion collective. La vie d’une opération de ce type de ne s’arrête pas à la livraison de l’équipement, elle s’inscrit dans la durée, et il faut le prévoir.
L’individualisme se développe, dit-on. Il existe à l’évidence des domaines où l’individu doit rester seul maître du jeu, mais c’est le sentiment de perte de contrôle sur son propre avenir, sur ses intérêts personnels, qui est à l’origine de cette progression. Big brother et une mondialisation incontrôlée n’y sont pas étrangers.  La perte de confiance dans le collectif est un phénomène dont on doit tenir compte, et qui mérite une réaction vigoureuse. Mais l’action collective est bien plus puissante, quand elle est portée par l’ensemble des acteurs et fait l’objet d’un consensus, bien au-delà d’une acceptation résignée. L’action collective a de beaux jours devant elle, mais elle exige des consensus durs !

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